La thématique de la « patrouille perdue » est un trait commun de la narration héroïque des guerres. Elle est même récurrente dans le cinéma hollywoodien dès ses origines. En 1929, le roman de Philip MacDonald, Patrol1 , consacré à ses souvenirs mésopotamiens de la Première Guerre mondiale est adapté pour Walter Summers. Mais The lost Patrol ne connut le succès qu’avec la version réalisée en 1934 par John Ford. En France, la « patrouille perdue » alimente plutôt la littérature légionnaire et sa mythologie désertique2 . Dès 1942, le général René-André Gérin l’utilise dans un article de la Revue de l’Armée Française pour mettre en scène les aventures méharistes du capitaine Henry Lanney de Courten3. Soixante ans plus tard, l’ancien Premier ministre Pierre Messmer intitule ainsi une suite de nouvelles autobiographiques4. Le titre est tiré du récit de l’évacuation de la place de Bir Hakeim, au cours de laquelle le capitaine Messmer, commandant une compagnie de la 13 e demi-brigade de Légion étrangère, perdit la patrouille de l’adjudant-chef Radomir Pavitchevitch ; retrouvée cinq jours plus tard, elle ramenait une colonne de prisonniers allemands.
La presse parisienne s’est appropriée la thématique de la « patrouille perdue » en novembre 1990. Mais le ton était moins à l’épopée. Le 2 novembre, alors que des rumeurs commençaient à circuler quant à un engagement mortel entre des éléments français de la division Daguet et des forces irakiennes, le ministère de la Défense avait publié un étonnant communiqué. De Paris, le commandant du Service d’information et de relations publiques des armées (SIRPA), le général de brigade Raymond Germanos, annonçait en substance que trois militaires, un officier et deux sous-officiers, en mission de reconnaissance aux abords de la frontière irako-saoudienne, avaient été surpris et capturés par une patrouille irakienne avant d’être conduits à Bagdad et remis, par les autorités irakiennes, au chargé d’affaires de l’ambassade française, qui avait obtenu les conditions de leur rapatriement en France. D’Hafr al-Batin, où il était stationné, le commandant de la 6 e division légère blindée (DBL), le général de brigade Jean-Charles Mouscardès confirmait les faits qui s’étaient produits le 29 octobre. L’unité à laquelle les trois hommes appartenaient n’était pas révélée. Mais il était clair qu’ils appartenaient à un de ces éléments dits de « liaison » , opérant au profit exclusif du commandement à Riyad, dont la présence en Arabie saoudite était volontairement tenue secrète. Ce qui n’empêchait pas Jacques Isnard, dans Le Monde du 4 novembre 1990, de les identifier avec suffisamment de précision :
« Il s’agit d'une quarantaine d’hommes du 13 e régiment de dragons parachutistes (basé habituellement à Dieuze, en Moselle) et d’une dizaine d’hommes du 1 er régiment parachutiste d’infanterie de marine (stationné normalement à Bayonne, dans les Pyrénées-Atlantiques). Ces hommes, qui sont des cadres de métier ou des engagés, sont spécialisés dans le renseignement et l’action en profondeur, c’est-à-dire le plus au contact possible du dispositif adverse ».
Le 14 novembre, l’enquête de commandement, diligentée par le ministre de la Défense, Jean-Pierre Chevènement, ne tarda pas à confirmer les hypothèses journalistiques. Un capitaine, un sergent-chef et un sergent du 13 e régiment de dragons parachutistes (RDP) étaient bien rentrés de Bagdad le 4 novembre. « Quelques erreurs ont été commises », lâchait huit jours tard Jean-Pierre Chevènement sur Europe 1.
Suite : http://www.cf2r.org/fr/article/article-La-patrouille-perdue-5-9.php
samedi, décembre 29, 2007
Pourquoi les américains ont plié devant les iraniens ?
Alain Rodier
Le lundi 3 décembre, la Direction nationale du renseignement, qui centralise et synthétise les informations fournies par l’ensemble des agences de renseignement américaines, a rendu public un rapport (National Intelligence Estimate/NIE) estimant que l’Iran a arrêté son programme nucléaire militaire depuis fin 2003 en raison des pressions internationales. Néanmoins, ce rapport considère que si l’effort militaire iranien était relancé mi 2007, Téhéran pourrait théoriquement produire des armes nucléaires à partir des années 2010-2015.
Il s’agit là d’une volte-face radicale. Le précédent rapport sur le nucléaire iranien, rendu public en 2005, mettait en avant la détermination de Téhéran de se doter de l’arme nucléaire. C’est sur ce document que s’appuyait le président Bush pour réclamer plus de sanctions et envisager l’emploi de la force pour faire cesser le programme nucléaire iranien.
Téhéran ne s’y est pas trompé et s’est officiellement réjoui du contenu du dernier NIE qui éloigne la perspective d’une attaque préventive menée par les forces américaines.
Erreur ou manœuvre du renseignement américain ?
La publication de ce rapport conduit à formuler plusieurs hypothèses.
Suite : http://www.cf2r.org/fr/article/article-Pourquoi-les-americains-ont-plie-devant-les-iraniens-3-111.php
Le lundi 3 décembre, la Direction nationale du renseignement, qui centralise et synthétise les informations fournies par l’ensemble des agences de renseignement américaines, a rendu public un rapport (National Intelligence Estimate/NIE) estimant que l’Iran a arrêté son programme nucléaire militaire depuis fin 2003 en raison des pressions internationales. Néanmoins, ce rapport considère que si l’effort militaire iranien était relancé mi 2007, Téhéran pourrait théoriquement produire des armes nucléaires à partir des années 2010-2015.
Il s’agit là d’une volte-face radicale. Le précédent rapport sur le nucléaire iranien, rendu public en 2005, mettait en avant la détermination de Téhéran de se doter de l’arme nucléaire. C’est sur ce document que s’appuyait le président Bush pour réclamer plus de sanctions et envisager l’emploi de la force pour faire cesser le programme nucléaire iranien.
Téhéran ne s’y est pas trompé et s’est officiellement réjoui du contenu du dernier NIE qui éloigne la perspective d’une attaque préventive menée par les forces américaines.
Erreur ou manœuvre du renseignement américain ?
La publication de ce rapport conduit à formuler plusieurs hypothèses.
Suite : http://www.cf2r.org/fr/article/article-Pourquoi-les-americains-ont-plie-devant-les-iraniens-3-111.php
Retex Afghanistan: bilan mitigé pour les forces spéciales françaises
Le bilan officiel de leur action est strictement classifié, mais plusieurs éléments peuvent être pointés.
1) Les conditions de leur retrait, d'abord. Elles n'ont jamais été expliquées d'un point de vue militaire. L'état-major des armées le souhaitait depuis plus d'un an et les choses ont trainées, essentiellement pour ne pas trop mécontenter les Américains. Le COS a perdu sept hommes. Pour quel résultat ? S'il était aussi important de tenir le secteur de Spin Boldak, l'une des portes d'entrée depuis le Pakistan, pourquoi l'avoir abandonné à la mi-2006 ?
2) Les conditions d'emploi. Le COS a été employé pour des missions d'infanterie légère, comparable aux commandos de chasse de la guerre d'Algérie. Ce ne sont pas véritablement des opérations spéciales, plus ponctuelles. Le détachement Arès devait tenir un secteur géographique. Il n'a pas participé à des opérations communes avec les Américains et leurs alliés - tous parfaitement anglophones, ce qui n'est évidemment pas le cas des unités françaises. En revanche, il était placé sous le commandement des Américains et devaient faire appel à leurs hélicoptères, faute de voilures tournantes françaises.
3) Cette mission d'infanterie légère a mis en lumière des manques dans la formation des unités de COS. Seul le 1er RPIMa est essentiellement formé de fantassins. Ce n'est ni le cas du 13 ème RDP, ni des commandos marine, ni des commandos de l'air - qui ne sont pas à proprement parler des fantassins. Depuis leur retour, les forces spéciales, en particulier celles de l'armée de terre (BFST), ont modifié leur entrainement, avec par exemple des exercices communs avec des régiments d'infanterie, comme le 1er Tirailleurs.
4) Depuis leur départ, des unités non rattachées au COS effectuent des missions d'encadrement de l'armée nationale afghane, dans le cadre des OMLT (Operationnal Mentoring Liaison Team). Ces missions sont, en théorie, celles d'unités spéciales. Le 13 ème BCA ou la brigade logistique semblent parfaitement faire l'affaire...
5) La communication a été désastreuse. Aucune information officielle, mais des photos vendues au prix fort - par des membres du détachement eux-même - à Paris-Match ou à VSD. Sur l'une d'entre elle, on voyait même le chef d'état-major des armées en visite au camp de Spin Boldak...
1) Les conditions de leur retrait, d'abord. Elles n'ont jamais été expliquées d'un point de vue militaire. L'état-major des armées le souhaitait depuis plus d'un an et les choses ont trainées, essentiellement pour ne pas trop mécontenter les Américains. Le COS a perdu sept hommes. Pour quel résultat ? S'il était aussi important de tenir le secteur de Spin Boldak, l'une des portes d'entrée depuis le Pakistan, pourquoi l'avoir abandonné à la mi-2006 ?
2) Les conditions d'emploi. Le COS a été employé pour des missions d'infanterie légère, comparable aux commandos de chasse de la guerre d'Algérie. Ce ne sont pas véritablement des opérations spéciales, plus ponctuelles. Le détachement Arès devait tenir un secteur géographique. Il n'a pas participé à des opérations communes avec les Américains et leurs alliés - tous parfaitement anglophones, ce qui n'est évidemment pas le cas des unités françaises. En revanche, il était placé sous le commandement des Américains et devaient faire appel à leurs hélicoptères, faute de voilures tournantes françaises.
3) Cette mission d'infanterie légère a mis en lumière des manques dans la formation des unités de COS. Seul le 1er RPIMa est essentiellement formé de fantassins. Ce n'est ni le cas du 13 ème RDP, ni des commandos marine, ni des commandos de l'air - qui ne sont pas à proprement parler des fantassins. Depuis leur retour, les forces spéciales, en particulier celles de l'armée de terre (BFST), ont modifié leur entrainement, avec par exemple des exercices communs avec des régiments d'infanterie, comme le 1er Tirailleurs.
4) Depuis leur départ, des unités non rattachées au COS effectuent des missions d'encadrement de l'armée nationale afghane, dans le cadre des OMLT (Operationnal Mentoring Liaison Team). Ces missions sont, en théorie, celles d'unités spéciales. Le 13 ème BCA ou la brigade logistique semblent parfaitement faire l'affaire...
5) La communication a été désastreuse. Aucune information officielle, mais des photos vendues au prix fort - par des membres du détachement eux-même - à Paris-Match ou à VSD. Sur l'une d'entre elle, on voyait même le chef d'état-major des armées en visite au camp de Spin Boldak...
Belle prise
Manche : La marine surprend un navire chargé de patrouilleurs lance-missiles
http://www.meretmarine.com/diaporama.cfm?id=106461&page=1
Les services du renseignement maritime ont réalisé une « belle pêche », tout récemment, au large de Cherbourg. Profitant de l'intense trafic commercial de la Manche, le Eide Transporter, chargé d'une cargaison très spéciale, tentait de passer inaperçu pour rejoindre l'Atlantique. De loin, ce bateau pouvait être aisément confondu avec un roulier mais il s'agissait, en réalité, d'un navire semi-submersible. Alors qu'il se trouvait à une quinzaine de nautiques des côtes du Cotentin, la Marine nationale a dépêché un hélicoptère Dauphin pour le survoler et se rendre compte, sur place, de la nature de sa cargaison. Le Eide Transporter abritait, en fait, deux patrouilleurs lance-missiles de fabrication russe, destinés au Vietnam. Du type Tarantul V, ces unités de 56 mètres et 500 tonnes sont, notamment, armées de 16 missiles antinavires SSN-X-25. « Cette opération montre le rôle important joué quotidiennement par les acteurs de l'organisation du renseignement maritime, notamment les structures opérationnelles, comme le COM Cherbourg, la chaîne sémaphorique et le centre de renseignement de la marine et, au travers de la coopération inter-administrations, les CROSS », souligne la Marine nationale. Cette dernière estime que la découverte de l'Eide Transporter « souligne que le trafic commercial maritime peut être d'un intérêt militaire direct, à l'exemple du transport de matériel de guerre, y compris en limite de nos eaux territoriales ».
http://www.meretmarine.com/diaporama.cfm?id=106461&page=1
Les services du renseignement maritime ont réalisé une « belle pêche », tout récemment, au large de Cherbourg. Profitant de l'intense trafic commercial de la Manche, le Eide Transporter, chargé d'une cargaison très spéciale, tentait de passer inaperçu pour rejoindre l'Atlantique. De loin, ce bateau pouvait être aisément confondu avec un roulier mais il s'agissait, en réalité, d'un navire semi-submersible. Alors qu'il se trouvait à une quinzaine de nautiques des côtes du Cotentin, la Marine nationale a dépêché un hélicoptère Dauphin pour le survoler et se rendre compte, sur place, de la nature de sa cargaison. Le Eide Transporter abritait, en fait, deux patrouilleurs lance-missiles de fabrication russe, destinés au Vietnam. Du type Tarantul V, ces unités de 56 mètres et 500 tonnes sont, notamment, armées de 16 missiles antinavires SSN-X-25. « Cette opération montre le rôle important joué quotidiennement par les acteurs de l'organisation du renseignement maritime, notamment les structures opérationnelles, comme le COM Cherbourg, la chaîne sémaphorique et le centre de renseignement de la marine et, au travers de la coopération inter-administrations, les CROSS », souligne la Marine nationale. Cette dernière estime que la découverte de l'Eide Transporter « souligne que le trafic commercial maritime peut être d'un intérêt militaire direct, à l'exemple du transport de matériel de guerre, y compris en limite de nos eaux territoriales ».
vendredi, décembre 28, 2007
Selon un psychiatre militaire, "l'idéal de secourir a remplacé l'idéal de combattre"
Lors du colloque organisé lundi par Inflexions, la revue intellectuelle de l'armée de terre, le médecin chef Patrick Clervoy a prononcé une intervention très remarquée, basée sur son expérience de psychiatre et plus spécifiquement de référent du Service de santé des armées en matière de soutien psychologique des forces.
"L'idéal de secourir a remplacé l'idéal de combattre", explique-t-il. "Devant la menace ou la nécessité d'une intervention armée, des militaires me disent: "je ne me suis pas engagé pour cela. L'engagement est présenté comme avant tout humanitaire, qui exclut la notiond 'usagage agressif des armes. Voici des verbes puisés dans le discours humanitaire: défendre, servir, secourir, aider, assister, soulager, protéger, approvisionner, transporter, bâtir, restaurer". Le médecin-chef note "l'absence de verbes relatifs à une action spécificiquement martiale, c'est-à-dire concernant un ennemi désigné qu'il faudrait combattre, détruire, anéantir, percer, écraser, vaincre". Une rupture se produit lorsque le soldat qui a adopté une posture humanitaire se trouve projeté dans une actiond e combat. Leur engagement n'est pas soutenu par un discours de combat".
"Quel discours porte aujourd'hui l'institution militaire dans les médias, quelles sont les images privilégiées dans les reportages ?" s'interroge l'officier psychiatre qui constate "l'évitement des spectacles sanglants". "Le terme verbal défendre n'est-il pas devenu l'euphémisme de celui de combattre. Il y avait autrefois un ministère de la Guerre, devenu ministère des armées, puis aujourd'hui celui de la défense. Ne faudrait-il pas remartialiser notre vocable en parlant de ministère des forces armées? " demande le médecin.
Nous reviendrons sur d'autres thèmes de cette intervention très riche. Patrick Clervoy vient de publier "le syndrome de Lazare, traumatisme psychique et destinée" chez Albin Michel.
Le colloque d'Inflexions, que j'ai eu le plaisir de "modérer", a réuni de nombreuses personnalités du monde intellectuel comme l'historien jean-Noël Jeanneney, l'anthropologue Véronique Nahum-Grappe, le sociologue Michel Maffesoli, le chroniqueur Alain-Gérard Slama, le romancier François Sureau ou le président du Comité consultatif national d'éthique Didier Sicard.
"L'idéal de secourir a remplacé l'idéal de combattre", explique-t-il. "Devant la menace ou la nécessité d'une intervention armée, des militaires me disent: "je ne me suis pas engagé pour cela. L'engagement est présenté comme avant tout humanitaire, qui exclut la notiond 'usagage agressif des armes. Voici des verbes puisés dans le discours humanitaire: défendre, servir, secourir, aider, assister, soulager, protéger, approvisionner, transporter, bâtir, restaurer". Le médecin-chef note "l'absence de verbes relatifs à une action spécificiquement martiale, c'est-à-dire concernant un ennemi désigné qu'il faudrait combattre, détruire, anéantir, percer, écraser, vaincre". Une rupture se produit lorsque le soldat qui a adopté une posture humanitaire se trouve projeté dans une actiond e combat. Leur engagement n'est pas soutenu par un discours de combat".
"Quel discours porte aujourd'hui l'institution militaire dans les médias, quelles sont les images privilégiées dans les reportages ?" s'interroge l'officier psychiatre qui constate "l'évitement des spectacles sanglants". "Le terme verbal défendre n'est-il pas devenu l'euphémisme de celui de combattre. Il y avait autrefois un ministère de la Guerre, devenu ministère des armées, puis aujourd'hui celui de la défense. Ne faudrait-il pas remartialiser notre vocable en parlant de ministère des forces armées? " demande le médecin.
Nous reviendrons sur d'autres thèmes de cette intervention très riche. Patrick Clervoy vient de publier "le syndrome de Lazare, traumatisme psychique et destinée" chez Albin Michel.
Le colloque d'Inflexions, que j'ai eu le plaisir de "modérer", a réuni de nombreuses personnalités du monde intellectuel comme l'historien jean-Noël Jeanneney, l'anthropologue Véronique Nahum-Grappe, le sociologue Michel Maffesoli, le chroniqueur Alain-Gérard Slama, le romancier François Sureau ou le président du Comité consultatif national d'éthique Didier Sicard.
samedi, décembre 15, 2007
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